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HUGUES FACORAT EDITION - L'être en lettres
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Auteurs - lecteurs : Vos mots
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L’heureux glissement.

L’heureux glissement.

« Écris, mais crie toute ton envie d’écrire à l’envi des plumes éternelles ! » 
J’avais vécu l’écart, la déviation quant à l’emploi de mes goûts langagiers. J’avais glissé du simple mot dit à l’oralité de tous les jours, à l’écrit arcane du journal studieux qui fut le seul manifeste des péripéties arbitrées par le maitre des lieux.
Il eut une rupture directe entre mon envie de machiner dans  l’oralité rébarbative, et mon envie de basculer vers le beau discours confus de l’écrit. Je passais de la syncope orale au mot complet laborieusement transcrit. Toute l’opération se passa dans l’anarchie du vocabulaire inapproprié, dans la progression incohérente des faits, dans le juste approximatif. J’ai raturé et zébré un bon paquet de papier, j’ai froissé, brûlé et jeté aux oubliettes des milliers de mots. Je tentais d’épouser le mouvement spontané de ma pensée volatile, par mon simple écrit. Je déménageais mes idées en perpétuelle ondoyance,  dans l’assurance scripturale du manuscrit jalousement rangé.
Je me rappelle avoir monté les marches de notre chez nous, pénétré la pièce maitresse et ouvert la vitrine en verre pour sortir un livre que j’avais pris dans un instant volé. Je me préparais au changement, à la progression imminente que j’avais prévue sans me le dire proprement. J’avais besoin d’une substitution sûre au bavardage inexpressif du quotidien. Je pouvais me fier à ce qui était écrit, je ne comprenais pas tout, mais j’avais confiance et ce en dépit de toute mon angoisse intérieure.
Je négociais mon penchant à l’écriture avec entrain et entêtement, je me réjouissais de mes séjours d’isolement dans l’étonnement perfide  des opposants. Je me soumettais à l’œuvre du mot et déniais l’incompréhension.
Dans toute l’intimité du mot je me suis enfouie, une sorte de trou préalablement creusé duquel je devais à chaque fois émerger, je devais assurer la durabilité du mot, je devais vivre le déchirement qu’est l’écriture. Je devais dans mes bonds répétés entre les deux pôles, supporter les drames de la fragmentation passagère, de la transposition et de la dissolution. 
 C’est pourquoi il est toujours difficile de parler d’écriture, difficile, car nous avouerons toujours les mêmes confidences : « J’écris pour l’amour des mots, j’écris quand je le sens, j’écris par nécessité, j’écris dans l’inconscient de l’acte, j’écris pour entretenir ce lien énonciatif avec ce monde si fermé qu’est l’incompréhension du tout… ».
L’écriture ne peut avoir un seul fondement subjectif, elle est la belle connotation de l’espoir d’une nouvelle parole, elle est le renouvellement du verbe à travers les siècles, elle est le gène consultant des générations, elle est le gène précoce de toute génération.
Pourrions-nous imaginer nos vies sans écriture, sans écrivains, sans poètes, sans les belles-lettre, sans le beau verbe ?
Nous serons indescriptibles, car dans tout mon transport, je me suis trouvée trahie par le déni d’un tel monde. Il y aurait le non-lieu, l’abîme du silence muet, l’absence de la parole, la laideur infinie de la nature non révélée, la vanité des aventures illustres, la vanité de toute l’existence.  
De l’Olympe, cité du génie grec, à nos jours ; loin du parler trivial du quotidien, du conversationnel, de l’enthousiasme premier des apprentis, mais dans l’esprit purement littéraire et dans l’esthétique imposante du texte, le rapport fortement établi avec la littérature est assuré par le pacte fait dans l’anonymat, des belles naissances qui naissent avec une belle plume accrochée à leur berceau.
Écrire, créer et recréer se feront toujours dans une pureté régénératrice. Si le mot parle et le fait bien, c’est l’œuvre exacte de l’art que doit être l’écriture, sinon, il faut se raviser et recommencer. 

                                 Extrait du deuxième ouvrage de notre auteur poète Soumia MEJTIA
                                                       Tous droits réservés/ Hugues FACORAT Édition.

Rédigé le  4 sep. 2015 16:49 dans Auteurs lecteurs Vos mots  -  Lien permanent

Commentaires

Lorsqu'une poétesse prend sa plume pour décrire cet étrange phénomène qui est l'écriture. Elle ne peut que créer un texte où chaque mot, chaque phrase, chaque paragraphe nous emmènent dans le labyrinthe de ce monde mystérieux. Vous avez raison, Sans littérature, notre monde sera fade et ennuyeux. Elle est ce qui nourrit notre coeur et notre esprit.
Publié par : Hraoui - 4 sep. 2015 19:24
Bonsoir Soumia

Ces mots me touchent beaucoup. Sans écriture "Il y aurait le non-lieu, l’abîme du silence muet, l’absence de la parole, la laideur infinie de la nature non révélée, la vanité des aventures illustres, la vanité de toute l’existence. "
Bonne continuation pour ce 2eme ouvrage.
Publié par : Lamiae - 5 sep. 2015 0:10
Très bel hommage à l'Ecriture ! Une écriture qui se dit elle - même, un texte dans l'art d'écrire qui définit cet art d'écrire. Un engagement ,qu'on ne peut plus sérieux, pour le verbe. Merci !
Publié par : Bahia - 5 sep. 2015 13:25
Toutes les âmes bien nées se préparent un jour ou l’autre soit à un glissement heureux, soit une explosion libératrice. Ces âmes attendent le moment où la vie les transporte de ses gouffres pleins de malheurs vers ses points les plus culminants afin qu’ils puissent retrouver eux même, pour être eux même et pour découvrir le secret de leur profondeur par eux même... Nous ne pourrons jamais devenir la personne que nous imaginons être si nous ne passions pas tantôt par un glissement inaperçu, tantôt par une explosion subite qui rendra de nous le sujet de notre existence : ces deux types de révolution qui casseront la mer gelée en nous comme tu dis Kafka.
Publié par : Reda Zgani - 6 sep. 2015 17:17
Tu sais chère Soumia, l’explosion n’était pas ce que tu devrais faire, ni à quoi je m’attendais de la personne humble que tu es. Je dirais que tu as bien fait de choisir le glissement ; tu es une femme, tu es une « écorchée vive » et l’explosion ne te siéra jamais, le glissement du bavardage au mot te va à merveille parce qu'il a été sans le moindre heurt. Quand j'ai commencé la lecture de ton texte, je t’ai imaginé ce papillon libéré de sa chenille avant même que je ressentisse le bonheur d’être soi remplissant chacun de tes mots. Il est vrai que ton glissement était heureux, mais je trouve aussi qu’il était d’une finesse extrême à tel point qu’il a dérapé pour atteindre le style dont tu l’as décrit. La vie qui épluche l’univers de ses insensibles en les ensevelissant dans les linceuls de l’ignorance a fini par t’élire tout en te transportant là où tu devrais être, là où les bonnes âmes se rencontrent et substituent le verbiage par la beauté des lettres, de là où je t’écris en ce moment. J'ai aussi constaté que le mot n'a jamais eu l'intention de t’abandonner un jour, comme il n’aura jamais à le faire, toi qui l’as profondément compris et aimé, toi qui as bel et bien eu confiance en lui, il est reconnaissant et il continuera de l’être tant que ta fidélité pour lui n’est pas encore finie. Le mot ne te trahira jamais tant que tu ne l’as pas fait toi-même ! Si un jour le mot semblait ingrat dans quelques yeux, c'est qu’il l’était envers ceux qui ignoraient sa valeur, c’est pourquoi il ne cessera nullement de les réprimander.
Publié par : Reda Zgani - 6 sep. 2015 17:19
Parfois, le mot nous semble parfait, sauf que la réalité nous élucide qu’il ne l’était jamais comme tout un chacun dans cet univers. Le problème du mot réside dans son incapacité de se promener à pieds, il a les pieds mutilés si j’ose dire, c’est pourquoi celui-ci serait dans une perpétuelle recherche de son conducteur. Le mot a vu que tu étais cette personne digne de le conduire, il savait bien que tu pourrais le ramener au-delà des inessentiels. Il savait aussi que ta charrette avait toute l’aptitude de le faire promener là où la pensée est rarement accessible, il savait que t’étais prête à te sacrifier et vivre la solitude que pour lui faire plaisir. Le beau verbe et les belles-lettres t’ont choisi chère Soumia, le temps où ils t’ont sollicité pour la première fois, car c’est par eux et en eux que tu as réussi ton glissement et que ton glissement était heureux. Et je suis heureux autant que ton glissement pour ton deuxième ouvrage, mon agréable amie, heureux pour ce glissement fignolé et continuel. L’explosion restera mon affaire un jour ou l’autre…
Publié par : Reda Zgani - 6 sep. 2015 17:19
J’ai lu tous vos commentaires que j’ai suivis de trop près Samira, Lamiae Baya et Réda, je ne pourrai jamais tomber de ma plume, je l’étreins et pense aux écrits qui m’attendent. Je me laisserai encore surprendre par les tournures nombreuses du verbe qui trouveront encore refuge chez vous MES CHERS LECTEURS. Je ne suis pas seule dans mon ambitieux asile ,je vous y retrouve pour un court moment, mais je ne suis point seule. MERCI !
Publié par : Soumia MEJTIA - 6 sep. 2015 19:52
Elle est née de l'écriture et avant elle il n' y avait qu'un jeu de miroirs. C'est la réalité qu'elle veut atteindre. En écrivant, elle essaie d'arracher les images de son esprit et les réaliser hors d'elle. Écrivant, elle existe, mais elle n'existe que pour écrire. Je parle d'une chère amie et grande poétesse qui prend sa plume pour une épée. Seul, ce miroir critique lui offre son image.
Publié par : Marouan HADRI - 7 sep. 2015 11:28

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